Pour montrer la pauvreté, on peut sortir une demi-heure lors des premiers grands froids et filmer quelques sans-abri assis sur le trottoir ou au resto du cœur...
C’est ce qui se fait le plus couramment dans les médias, souvent pressés et tenus par les chiffres d’audience. On peut aussi, comme l’a fait Yves Dorme avec « Le prix du pain », prendre deux ou trois ans pour tracer des portraits, tout en nuances, en justesse, en respect.
« Le point de départ, je m’en souviens très bien, explique Yves Dorme : j’étais dans ma voiture et une ministre disait à la radio « Le prix du pain va être libéralisé et ça va être tout bénéfice pour tout le monde ». Je me suis dit qu’on était en train de toucher à quelque chose d’essentiel pour une certaine catégorie de la population, que j’avais rencontrée avant, quand j’étais éducateur. »
Le mot pauvreté devrait être utilisé au pluriel, tant il recouvre de réalités différentes : les personnes qui la vivent sont jeunes, plus âgées ou retraitées, travailleuses ou sans emploi, seules ou en famille… Pour la plupart d’entre nous, la pauvreté se résume en fait à des statistiques : « Quand on dit qu’il y a 17% de pauvres en Belgique, c’est comme s’il n’y avait personne derrière ces chiffres, remarque le réalisateur. Donc j’ai voulu donner un visage aux gens qui sont dans la précarité. »
Et ce visage, d’emblée, ne sera pas urbain. En milieu rural, la pauvreté est moins visible, elle est renforcée par les distances à parcourir, par le peu d’emplois disponibles, par l’isolement, souvent. « Au spectateur, on montre toujours la précarité bruxelloise, les gens dans les rues, les SDF. Je trouve qu’il faut montrer cette réalité, mais en ne montrant que ces images-là, on oublie la grande majorité des gens qui vivent dans la précarité. Je trouvais important de montrer que cette pauvreté ne se passe pas qu’en ville. Je voulais montrer différentes facettes de la pauvreté. »
Ainsi est né le projet de réaliser un reportage qui montre comment vivent au quotidien ceux et celles qui, dans les statistiques, sont sous le seuil de pauvreté.
Nous avons rencontré les trois autres protagonistes pour recueillir leurs impressions. Pourquoi Geneviève, Guy et Laetitia ont-ils accepté de se lancer dans cette aventure un peu particulière ?
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