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14 octobre 2021  Archives des actualités

Lutte contre la pauvreté et climat

Jean-Pascal van Ypersele à la rencontre d’associations sinistrées

Le lundi 27 septembre, à l’initiative d’Action Vivre Ensemble et de l’asbl "De bouche à oreille" le climatologue Jean-Pascal van Ypersele s’est rendu à Eupen, Dolhain, Pepinster et Verviers pour rencontrer des associations touchées par les inondations de la mi-juillet.

Cette visite avait pour objectif de permettre au climatologue de voir la réalité du terrain, toujours désastreuse presque trois mois après les inondations. L’occasion également de faire le lien entre urgence climatique et urgence sociale. En effet, si les eaux n’ont pas été sélectives, une fois encore, ce sont les personnes vulnérables qui semblent avoir été les plus durement touchées.

Eupen - Maison Viertelhaus Cardijn

Pour son premier arrêt, le climatologue s’est rendu à Eupen, où il a rencontré Bianca Croé, la coordinatrice de la maison Viertelhaus Cardijn. Cette maison de quartier normalement fréquentée par 200 à 300 personnes par semaine a été complétement ravagée par les inondations. « On est localisé au confluent de la Vesdre et de la Helle et cette dernière a débordé, emportant un mur et traversant le bâtiment que nous occupons", explique la coordinatrice qui a insisté sur les difficultés rencontrées par les personnes sinistrées. « Certaines ont absolument tout perdu. » Malgré les difficultés rencontrées par les sinistrés, la coordinatrice de la maison de village a insisté sur la grande solidarité née suite aux inondations. "Très rapidement, les gens se sont mobilisés pour nous aider et nous permettre de reprendre certaines de nos activités dans d’autres locaux. » Parmi les activités qui ont repris, il y a notamment la garderie, l’école des devoirs, les cours d’allemand ou encore les rencontres entre femmes. « C’était très important pour les bénéficiaires de pouvoir parler de leur vécu et de se retrouver » conclut Bianca Croé.

© Fréderic Pauwels

Jean-Pascal van Ypersele s’est ensuite rendu à Dolhain, où il a rencontré l’échevin aux travaux Luc Delhez, puis à Pepinster, où il a rencontré les équipes de la Société Saint-Vincent-de-Paul Frédéric Ozanam.


Il faut venir ici pour le voir. J’ai lu tous les articles mais être ici, c’est du concret. Ça montre bien que la situation est encore pire. Je suis scientifique. Je travaille sur le climat depuis 40 ans. Souvent, les conséquences du changement climatique, ce ne sont que des chiffres. Ici, c’est la dure réalité.

Pepinster - Société Saint-Vincent-de-Paul "Frédéric Ozanam"

Pepinster est l’une des communes les plus touchées par les inondations. En plus des maisons qui se sont écroulées le jour J, quelques 40 maisons devraient être démolies d’ici la fin du mois d’octobre. "Il faut venir ici pour le voir. J’ai lu tous les articles mais être ici, c’est du concret. Ça montre bien que la situation est encore pire. Je suis scientifique. Je travaille sur le climat depuis 40 ans. Souvent, les conséquences du changement climatique, ce ne sont que des chiffres. Ici, c’est la dure réalité", raconte le climatologue. Sur place, Jean-Pascal van Ypersele était attendu par une partie de l’équipe de la Société Saint-Vincent-de-Paul "Frédéric Ozanam", recueillie pour l’occasion par Betchette dans son café « Amon nos autes ». Pour cette équipe, plus d’atelier-cuisine, plus de magasin de seconde main, les inondations ont tout emporté. L’association continuent cependant la distribution de colis alimentaires et est très présente aux côtés des personnes sinistrées. Parmi les bénévoles présents pour accueillir le climatologue, on fait la connaissance de Joël Humblet. Bénéficiaire aujourd’hui bénévole, il a tout perdu à la mi-juillet. Coincé sur un toit avec dix-huit autres personnes dans la rue du pont Walrand, il a attendu huit heures avant de pouvoir être secouru, entouré de maisons qui s’écroulaient comme des châteaux de carte "L’eau est montée jusqu’au 3/4 du premier étage ! On n’aurait jamais imaginé ça. Il y a eu le barrage d’Eupen, mais j’ai aussi pris conscience du changement climatique. Je ne suis pas militant à la base, ou intéressé par le climat. Mais je vais apprendre !" Deux mois plus tard, on voit des façades arrières effondrées, des intérieurs aux quatre vents, des voitures encastrées. Une véritable zone de guerre comme le souligne Jean-Pascal van Ypersele : « La dévastation est encore plus grande que ce qu’on peut imaginer. La réalité dépasse la fiction. Cela renforce encore une fois ma détermination à lutter contre ces changements climatiques et surtout à expliquer pourquoi c’est important. Si on continue à ne rien faire, on va avoir ce genre de chose de plus en plus souvent. »

La problématique de l’accès au logement

En discutant avec les différents membres de l’équipe, Jean-Pascal van Ypersele a pu prendre connaissance des enjeux auxquels est confrontée l’asbl Saint-Vincent de Paul depuis les inondations. «  Ce qui nous inquiète surtout, c’est la problématique du logement », lui indique Océane Drooghaag, assistante sociale. La situation est encore pire qu’avant et nous n’avons malheureusement pas beaucoup de prise là-dessus. » Comme nous l’explique ensuite Joël, retrouver un logement est loin d’être simple. De son côté, il a finalement trouvé un studio transitoire qu’il louera pendant un an, le temps de se retourner. « J’ai fait pas mal de recherches dans toute la région verviétoise et on le voit, les loyers ont augmenté depuis les inondations, et les propriétaires sont plus exigeants aussi, que ce soit par rapport aux animaux de compagnies, mais aussi aux enfants. » nous explique-t-il.

Un autre problème soulignée cette fois par Mauricette Lambotte, c’est que "La plupart du temps, les personnes sinistrées sont des locataires et non des propriétaires." C’est donc au propriétaire de faire les démarches pour les travaux et cela peut prendre encore plus de temps. Autre réalité, certaines personnes, qui ont eu la chance d’échapper aux inondations se voient contraintes de quitter leur logement pour céder leur place aux propriétaires sinistrés qui réinvestissent leur location pendant les travaux. Double peine. Enfin, pour les personnes qui avaient déjà du mal à trouver un logement, il y a une mise en concurrence avec les personnes sinistrées et leur prime. Mise en concurrence pour des personnes qui étaient déjà en difficulté.

Verviers - MJ Récollets , l’asbl La Page et la Maison Marie-Louise

La dernière étape était verviétoise, avec un premier arrêt à la Maison des Jeunes des Récollets, suivi d’un parcours à pieds dans les quartiers du bas de la ville, en passant par l’école de devoirs La Page, où Jean-Pascal van Ypersele a également eu l’occasion d’entendre Nicole Mathonet, responsable de la Maison Marie-Louise.

Pour la MJ des Récollets, elle-même sinistrée, la situation actuelle n’est pas du tout évidente. « Tout notre travail a été impacté. Tout ce qu’on a mis en place depuis 40 ans a pris l’eau » nous confie Raphaël Gillot, membre de l’équipe de la MJ. Faute d’endroit pour les accueillir, la MJ a dû mal à maintenir un lien avec les adolescents. « Les jeunes ont fui le centre de Verviers, nous explique le coordinateur Yves Reuchamps En même temps, je les comprends. Qui aurait envie d’aller se poser près de la Vesdre pour le moment ? Et chez nous, ça pue ! » Des jeunes qui ont d’ailleurs d’autres préoccupations. « Ils viennent de vivre une rentrée scolaire encore compliquée. Certains n’ont toujours pas pu regagner leur domicile… Ils tentent d’abord de se concentrer sur les cours. Leur réalité, pour le moment, c’est celle-là. » Vu les dégâts au sein du bâtiment, l’équipe de la MJ envisage de devenir plus mobile « afin d’aller chercher les jeunes là où ils sont ». Elle devrait aussi intégrer temporairement un nouveau local, rue des Alliés.

Du côté de l’asbl La Page dont les bâtiments ont été épargnés, la vie reprend peu à peu son cours. « Niveau sécurité, dans le quartier, il y a encore beaucoup de choses qui stagnent, explique la coordinatrice Julie Kuetgens. Il manque par exemple toujours des barrières le long de la Vesdre. Les détritus ont été enlevés dans les rues mais cela prend du temps. » Au-delà des dégâts matériels, encore visibles le long de la Vesdre, elle explique que certains enfants ont peur de la pluie ou de devoir à nouveau quitter leur maison la nuit. « Les gens sont dans une détresse incroyable ».
« Des enfants qui ont peur de la pluie », cette phrase marquera profondément le climatologue.

Enfin, Nicole Mathonet, responsable de la Maison Marie-Louise, nous a fait part de son désarroi face à l’ampleur des dégâts au sein de son association. Agrée en tant que maison d’accueil, elle gère également une vingtaine d’immeubles, composés de logements d’insertion. Dix-huit d’entre eux ont été impactés par les inondations. Tout comme le centre névralgique et historique de la Maison Marie-Louise qui héberge normalement les hommes seuls. Le défi est donc de taille pour l’asbl qui doit trouver des solutions pour pouvoir reloger des personnes, qui bénéficiaient déjà d’un logement d’urgence.
En fin d’après-midi et en guise de conclusion de cette journée, Jean-Pascal van Ypersele a donné une conférence, nourrie de ses observations sur le terrain et ouverte à tous, au temple protestant de Verviers. Cette conférence peut être réécouter ici





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