Depuis un quart de siècle, Comme chez nous a développé à Charleroi plusieurs types de services d’aide ciblés aux populations les plus précarisées du pays noir. En quelques années, le nombre de personnes accueillies a été multiplié par… dix !
Ce sont trois vieilles maisons vétustes de la Ville Basse. Entre chancres dont la pauvreté et la prostitution ont été chassées en vain et centres commercial et culturel flambant neufs, l’ex-rue Léopold rebaptisée de Charleville en raison du passage de Rimbaud à Charleroi. Elles résument bien toutes les contradictions d’une ville qui voudrait effacer les stigmates d’un passé indélébile pour sacrifier à la modernité. Pourtant, à deux pas des nouveaux quais de Sambre, le cœur de ce « Charleroi social » vit encore et toujours de la générosité de ceux qui s’y impliquent depuis 25 ans. C’est-à-dire juste après que l’abrogation du vagabondage a eu pour effet de sortir les sans-abri des prisons et… de mettre sur pied des abris de nuit, puis de jour.
Créé par l’Abbé Trigalet
Un peu considéré comme l’Abbé Pierre belge, l’Abbé Paul Trigalet est décédé au début de l’été 2018. Il était âgé de 83 ans. Prêtre-ouvrier sensible à la cause des personnes sans abri, il a inspiré une grande partie des associations sociales du centre de Charleroi, notamment en créant Solidarités Nouvelles mais aussi au travers de nombre de services de Comme chez nous.
C’est là que Comme chez nous a installé historiquement son premier-né, le centre d’accueil de jour Le Rebond, avec juste une soupe comme premier service. Depuis un quart de siècle, Comme chez nous fonctionne encore et toujours quotidiennement avec les excédents de soupe de la cantine de l’Institut Notre-Dame voisin ! Depuis, l’association n’a cessé de faire des petits, qui ont tous leur raison d’être. « En 2000 encore, calcule Sophie Crapez, la coordinatrice, nous avions une centaine d’‘accueillis’ réguliers, des mal-logés, au Rebond. Aujourd’hui, on est à plus de 1000 personnes différentes par an. Mais, globalement, au contraire de Bruxelles par exemple, où il y a un public de migrants, l’immense majorité des gens qui sont ici sont belges et ont une attache avec la région. »
L’accueil est, selon les mots de Sophie Crapez et de Manu Condé, responsable de projet, « la porte d’entrée vers un travail plus important, un travail de lien. Les ‘accueillis’ ont un pied dans la salle et nous essayons de les attraper pour les orienter vers d’autres projets. On va aller au-delà de leur demande d’urgence en les amenant à reprendre des chemins d’insertion par le biais du dialogue, à détricoter les problèmes. Notre priorité, c’est créer du lien, libérer la parole, identifier des besoins qui sont la plupart du temps inconnus ou refoulés par les principaux intéressés eux-mêmes ! »
Outre Le Rebond, les autres « enfants » de la maison Comme chez nous sont Chez Toît pour un travail d’accompagnement en termes de logement et de relogement, Toudi Boudji, un service d’insertion citoyenne (ateliers cuisine, récup…) et RAPS (Recherche action en promotion de la santé) qui développe un travail d’éducation à la santé et de mise en œuvre de projets en faveur de l’insertion, du bien-être féminin (Les Fleurs du bien, voir page suivante) et des relations parents-enfants.
À Comme chez nous, on aime parler d’accueil lent. « On est toujours un peu hors cadre ! Par exemple, pour des personnes handicapées, il existe des structures adaptées. Le problème, c’est qu’il n’existe pas de structures adaptées à des profils psychologiques très particuliers comme des personnes handicapées qui sont aussi toxicomanes. Nous travaillons beaucoup dans ces contextes complexes. »