Pour que les personnes sans abri ne soient pas aussi privées de soins
Quatre fois par semaine, munies de leur sac à dos, d’une trousse de premiers soins et sourire aux lèvres, Camille et Fanny arpentent les rues de Liège pour proposer leur aide aux personnes sans abri. Récemment, ces deux jeunes et dynamiques infirmières ont créé leur propre association entièrement consacrée aux personnes privées de toit.
Leur association s’appelle « Smi-le », pour Service Mobile Infirmier liégeois. « Smi-le », c’est aussi la traduction de « sourire » en anglais. Et c’est effectivement avec sourire et empathie que les deux jeunes femmes vont à la rencontre de ceux et celles qui vivent dans la rue. Leur objectif ? Que les personnes privées de toit ne soient pas aussi privées de soins de santé.
À l’image de ses fondatrices, l’approche de Smi-le est résolument bienveillante, à l’écoute des besoins en santé physique et mentale de chacun·e et surtout basée sur la bonne humeur et l’optimisme.
<< Parce que nous sommes tous des êtres humains, parce qu’avoir accès aux soins de santé est un droit, parce que s’en sortir cela commence par un sourire. >> Voici les principes fondateurs de cette association.
« Fanfan, tu devrais montrer ça à un médecin », conseille Camille, qui commence à bien connaître Stéphane. « À un médecin ? Pour quoi faire ? », rétorque celui-ci du tac au tac. « Parce que ça dépasse mes compétences », répond l’infirmière, humblement.
Les pathologies rencontrées chez les personnes qui vivent dans la rue sont variées. « On peut avoir des pathologies aiguës, un abcès, une plaie… Et puis, on a tout ce qui est chronique, qui provient souvent des conséquences de la dure vie en rue : des problèmes de foie ou de cœur. Il faut s’y prendre le plus tôt possible pour éviter que ça se dégrade trop vite », détaille Fanny.
Camille et Fanny se sont donné pour mission de créer des ponts solides entre les personnes de la rue et les structures de santé. « L’idée, c’est d’orienter les personnes sans abri vers les structures de santé adéquates en fonction de leurs besoins et de leurs conditions de vie », explique Fanny. « Nous essayons de développer l’autonomie de nos bénéficiaires et leur participation active à leur prise en charge en les inscrivant dans un réseau de soins adaptés à leurs conditions de vie et visant la continuité des soins ». Pour y arriver, l’éducation à la santé est indispensable. « Nous travaillons sur le lien entre l’hygiène et l’apparition de plaies et sur l’importance de faire un soin sur une peau propre. »
La semaine dernière, Smi-le a accompagné Bruno prendre une douche. Une fois la douche prise, Fanny et Camille se chargent de lui refaire ses pansements. Pendant le soin, il déclare :« Vous savez pourquoi je semble m’endormir ? C’est parce qu’ici, je me sens en sécurité. Je n’ai pas peur et ne suis pas sur mes gardes, comme dans la rue. Tout mon corps se relâche et je me sens bien. »
Leur mission est délicate, auprès d’un public pas toujours enclin à se soigner. « Il faut créer une relation de confiance avec la personne », confirme Camille. « On va leur proposer notre aide, mais on ne peut pas la forcer à faire quoi que ce soit. C’est seulement une fois que cette relation de confiance est établie qu’on pourra prendre en charge la personne au niveau de sa santé », explique la jeune infirmière.
Stéphane, avec sa main blessée, finira par se laisser convaincre. Il ira bien consulter un médecin, à condition d’être accompagné des deux infirmières. « C’est plus rassurant que d’y aller tout seul. J’ai toujours eu une bonne entente avec ces deux demoiselles », explique-t-il.
Covid-19 : nouvel obstacle à la reconstruction des personnes sans abri
Avec la pandémie de Covid-19, les personnes sans abri ont dû faire face à de nouveaux obstacles. « Les masques et la distanciation physique ont vraiment creusé un fossé social et mis de côté les personnes vivant en rue. Elles se sentent encore davantage marginalisées » nous confie Camille. Autre conséquence de la crise sanitaire en rue. « On fait face à beaucoup plus de cas d’urgence. Avec beaucoup moins de passage dans les rues, ces gens sont livrés à eux-mêmes. » L’activité des deux jeunes femmes prend alors tout son sens, celui d’œuvrer pour les personnes que la pandémie a laissées de côté.