Dans notre société, le discours dominant nous veut autonomes, actifs ; il nous revient de prendre notre vie en main. Ce qui est valorisé, c’est la réussite individuelle. Cette façon d’envisager les choses nous divise et nous met en concurrence : travailleurs et chômeurs, bons et mauvais pauvres. Les uns actifs et méritants, les autres passifs et profiteurs.
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Depuis une quarantaine d’années, les risques liés au travail, les aléas de la vie ne relèvent plus de la responsabilité de l’État, qui n’aurait pas fourni les bases nécessaire à une certaine sécurité d’existence, mais de la responsabilité de l’individu lui-même qui n’aurait pas mis en place toutes les conditions pour réussir et atteindre ses objectifs. « Nous sommes dans une société où l’on encense les parcours individuels, a fortiori s’ils démarrent « de rien ». Individualiser, cela signifie notamment nier que les difficultés que vivent les chômeurs ou les bénéficiaires du revenu d’intégration sociale (RIS) ont aussi et souvent d’abord des causes sociales, politiques. »
Ce sont les individus qui sont pointés du doigt alors que les écarts entre les riches et les pauvres se creusent de plus en plus, que les inégalités deviennent normales et permettent aux plus puissants de s’enrichir dans l’impunité la plus totale. « Dans notre partie du monde, le pouvoir total est celui du capitalisme financier ; les modernisateurs sont entre autres ceux qui démantèlent les conquêtes sociales, réforment en appauvrissant, mais aussi ceux qui imposent à toutes les sphères d’activités, les services publics, les associations, d’adopter les règles et les mauvaises mœurs marchandes. »
Ces idées préconçues, alimentées par les médias, divisent et provoquent de la rancœur. On voit aujourd’hui des personnes tenir un discours du type : « Les réfugiés ont droit à des allocations et au logement alors qu’il y a des Belges qui dorment dans la rue ! C’est injuste ! ». Là encore, on oppose deux catégories distinctes de personnes, sans prendre le recul nécessaire pour se demander si elles n’ont pas quelque chose en commun .